L’accord de Paris et la question de l’écologie
La nouvelle est tombée jeudi soir : Donald Trump, président de la première puissance économique mondiale, a annoncé que conformément à sa promesse de campagne, son pays se retirerait de l’accord de Paris sur le climat négocié lors de la « COP 21 ». Cet accord, qui est censé viser à lutter contre le réchauffement climatique en limitant notamment les gaz à effet de serre, était présenté par les différents pays signataires comme une grande avancée écologique.
Pourtant, cet accord n’était même pas contraignant : il s’agissait d’un engagement fondé sur la bonne volonté, concept totalement abstrait dans les relations internationales, où chaque pays était censé faire de son mieux, sans sanctions prévues en cas d’échec. Les relations entre états bourgeois sont basés sur des rapports de force.
Les réactions internationales ont bien sûr été très négatives, la Chine, la Russie et la plupart des pays européens condamnant la décision des Etats-Unis. Pourtant, l’accord de Paris est-il le point central de la sauvegarde de la planète ? Cet accord permet-il de sauver les mers victimes de la pollution et de la surpêche ? Prévoit-il le remplacement du nucléaire ? Est-ce que cet accord envisage de régler la question de la déforestation, de protéger la biodiversité, de veiller à la qualité de l’eau ? Bien sûr que non. Il s’agit d’un accord de principe, qui permet aujourd’hui à des pays impérialistes de se présenter comme les défenseurs de la Terre, alors même qu’ils contribuent chaque jour à dévaster l’environnement, et donc à dégrader nos conditions de vie.
La vision bourgeoise de l’écologie
Rappelons que la question écologique est arrivée dans le débat public des pays occidentaux à partir des années 80. C’est une question récente, prise en compte de manière très inégale dans les masses. Les représentants autoproclamés de l’écologie en France sont liés à la petite bourgeoisie progressiste : il s’agit des Verts aujourd’hui alliés avec Europe écologie. Ces partis ont depuis longtemps fait le choix de servir d’auxiliaires au Parti Socialiste.
Une partie de la bourgeoisie n’a pas échappé à cette tendance. Celle-ci a besoin de se présenter comme moderne et d’occuper ce nouveau marché – car les énergies vertes ou la nourriture bio, par exemple, sont des marchés extrêmement rentables. Mais alors que la question écologique est une question mondiale, les frontières n’ayant ici aucune importance, cette partie « verte » de la bourgeoisie a produit une vision de l’écologie néfaste, incapable de répondre aux problèmes d’aujourd’hui. Cette écologie bourgeoise s’axe autour de deux thèmes :
- La délégation. L’écologie devrait être laissée aux scientifiques, aux techniciens, aux politiciens compétents, il s’agirait d’un domaine trop « sérieux » pour pouvoir véritablement mobiliser le peuple sur ces enjeux. Cela crée un réel mépris de classe : les masses seraient insensibles aux questions écologiques, idiotes, mangeraient mal volontairement, s’habilleraient en passant par les industries les plus inhumaines, etc.
- Le moralisme. Logiquement, ce mépris de classe produit une écologie moralisatrice, dans laquelle chaque personne serait responsable de son comportement : c’est la théorie du colibri, mettant au centre de la démarche nos choix alimentaires, vestimentaires, de transports, bref, nos choix de vie. Comme si la déforestation ou la destruction des océans pouvait être réglée une fois que chaque être humain aurait compris qu’il fallait fermer le robinet en se brossant les dents.
Ainsi, on comprend bien que le salut n’est pas à chercher de ce côté. Pire, cette conception de l’écologie est désastreuse, détournant la colère légitime vers des problématiques individuelles et abstraites et refusant de prendre la mesure du danger.
L’écologie matérialiste
Pour nous communistes, chaque question doit être posée en s’appuyant sur une lecture matérialiste du monde. Nous considérons que ce ne sont pas les idées qui produisent les faits, mais que les idées proviennent des faits matériels. Notre matérialisme contre leur idéalisme.
Pourquoi Donald Trump rejette-t-il l’accord de Paris, allant contre l’avis des principaux chefs d’entreprise américains ? On constate tout de suite que les discours réducteurs sur les méchants capitalistes ou sur la dimension agressive du président ne sont pas utiles pour expliquer ce choix.
Quels sont les faits ? Donald Trump représente l’affrontement de deux lignes au sein de la bourgeoisie des Etats-Unis : l’isolationnisme économique plutôt que le renforcement des liens d’interdépendance avec les économies européennes et asiatiques (principalement chinoise). Il s’appuie donc sur certains secteurs, comme l’industrie pétrolière, qui font des calculs à court termes. Dans cette situation, Donald Trump doit prouver à ses soutiens qu’il va défendre leurs intérêts, même en allant contre les objectifs à long termes d’autres entreprises américaines.
Est-ce que le président des Etats-Unis est si différent des chefs d’états et d’entreprises défendant l’accord de Paris ? Non, bien sûr. Aucun d’entre eux ne peut réellement affronter les problèmes écologiques qui menacent la planète, parce que poser ces problèmes signifierait s’opposer au mode de production capitaliste.
Puisque cette option est exclue, ils tentent de temporiser autant que possible, adoptant la technique de l’autruche : les faits seraient soumis aux idées, et prétendre que le réchauffement climatique n’existe pas, ou que la croissance américaine est la solution à tout, suffirait à régler les problèmes. Une telle attitude aujourd’hui est absolument criminelle et doit être considérée comme telle.
Notre vision de l’écologie est tout à fait différente : elle se base sur les faits matériels, sur la participation active des masses à la transformation révolutionnaire du mode de production. Nous affirmons aujourd’hui comme hier que seule une planification socialiste de la production au niveau mondial peut permettre de sortir du cauchemar capitaliste et de l’écocide qu’il engendre. Et cette affirmation pose la question du pouvoir : seule la prise du pouvoir par les masses, sous la conduite de la classe ouvrière, seule la guerre populaire permettront de régler ce problème.
Quelle est notre vision de l’écologie ? Il s’agit d’une vision globale, qui se construit nécessairement à l’échelle de la planète. Elle répond aux besoins réels de notre classe : vivre décemment, profiter de la nature sans la dégrader, produire de manière raisonnée et rationnelle pour subvenir aux besoins de chaque personne. Cela passe également par le développement d’une vision scientifique du monde qui nous entoure, par une éducation égalitaire et non réservée à l’élite, permettant de comprendre les enjeux de l’écologie et ses rapports avec la lutte des classes.
Le capitalisme, par sa nature même, est fondé sur l’anarchie de la production, c’est-à-dire sur la libre concurrence qui est sensée s’auto-réguler – une conception absolument idéaliste de l’économie, qui désarme les peuples face aux catastrophes pétrolières, à la montée des eaux ou aux scandales de l’agroalimentaire (élevage en batterie infâmes, OGM, pesticides…).
Poser la question de l’écologie aujourd’hui, c’est poser la question du passage au socialisme – c’est-à-dire la mise en place d’un système adapté aux exigences de notre siècle, efficace et humain, au service du peuple et non des capitaux.
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