Une étincelle peut embraser le pays !
Le 17 novembre dernier, une première journée de blocage national « contre la hausse des taxes » démarrait. Les retours de nos camarades, présents sur les piquets, blocages, dans les assemblées, étaient unanimes : la présence ouvrière était hégémonique, les revendications sociales explosaient, la rage de vaincre se mélangeait avec un enthousiasme explosif. Les premiers dirigeants du mouvement, les plus écoutés, sont de manière écrasante des ouvriers et des ouvrières, des membres des masses populaires, non-affiliés à des partis bourgeois. Ce sont les masses populaires et ouvrières, poussées par la volonté de lutter et de vaincre, qui s’organisent localement, malgré toutes les barrières (hégémonie réactionnaire, absence d’organisation ouvrière, etc.).Les trois semaines suivantes voient le déplacement des masses des barrages vers les centres villes bourgeois, où la police est débordée, où les Champs Elysées eux même sont pillées. Des centaines de milliers de personnes se rassemblent chaque jour, en pleine hiver. Près de Bordeaux, dans le médoc, une des régions les plus pauvres du pays, près de 3000 personnes tiennent un péage jours et nuits. Comme beaucoup d’autres, l’expulsion ne se passera pas sans heurts et le péage est partiellement incendié. Jusqu’en Belgique, la violence populaire et l’auto-organisation répondent à la violence des réformes du gouvernement Macron. Dans la colonie Réunionnaise, l’état deviens quasi-insurrectionnel. En quelques semaines, la bourgeoisie voit la classe ouvrière redevenir audacieuse. Nous tenterons d’analyser ce mouvement pour en tirer des conclusions pour préparer la date du 5 décembre et ses suites, qui s’annoncent explosives.
En effet, les principaux secteurs de la logistique voient se multiplier les appels à la grève générale et illimitée : SNCF, RATP, transporteurs routiers, chauffeurs de bus, personnel au sol des aéroports… Les syndicats sont obligés de la jouer « dur » devant la colère populaire, mais il se peut que le mouvement échappe à nouveau à tout contrôle. Ce 5 décembre deviens une perspective que la date du 16 novembre devra rendre encore plus évidente. Ainsi, en nous appuyant sur les leçons du mouvement des gilets jaunes, nous devons nous préparer à un nouveau mouvement de masse.
Cette grève illimitée a lieu à peine un an après la grande explosion du 17 novembre. Les masses, sans expérience, sans organisation, ont fait preuve d’un courage héroïque. Après des décennies de défaite, sans culture organisationnelle, sans aucune vision d’ensemble, une fraction importante de la classe ouvrière a décidé de se prendre en main, en particulier dans les zones périurbaines et rurales, où la petite bourgeoisie de gauche et ses organisations sont absentes. Les syndicats eux-mêmes étaient accueillis de manière ambivalente : d’un côté, rejet des confédérations et de leurs nombreuses trahisons, et d’un autre côté, le principal, des exemples d’implication sur le terrain des militantes et militants ouvriers des syndicats locaux au sein du mouvement de masse dès le début. Dès le début du mois de novembre, se sont multipliées les assemblées générales, les opérations escargot, manifestations à pied ou en véhicule, etc. La question, des taxes sur le carburant, se déplace vers la vie chère et la question : qui dirige l’Etat ? Qui profite de l’organisation actuelle de la société ? Pourquoi doit-on travailler pour survivre pendant que d’autres vivent grassement de notre travail, de notre misère ? Pourquoi les organisations de gauche prônent-elles la non-violence alors que seule la violence est efficace ?
Le mouvement des gilets jaunes a posé les mêmes questions que notre ligne idéologique, le marxisme-léninisme-maoïsme pose, et que notre Parti applique à la politique concrète de l’Etat français. La violence des masses désorganisés contre l’Etat a largement dépassé les démonstrations spectaculaires traditionnelles. Les images marquantes comme l’incendie de la préfecture du Puy en Velay, du péage de Narbonne, le pillage des champs Elysée ou encore le combat à mains nues de Christophe Dettinger contre les CRS ne sont que des exemples ; mais c’est partout que l’on a vu des prolétaires s’en prendre à la police, parfois armés de pierres, de bâtons, de boucliers, à visage découvert, voire à main nues. Le prolétariat a fait preuve une fois de plus de la justesse de la théorie de Marx, montrant qu’il est la seule classe révolutionnaire jusqu’au bout.
Une grande partie de la gauche a fait preuve de liquidationnisme, en tentant d’arrêter un mouvement d’une classe qui n’était pas la leur. Dès le début, les « Gilets Jaunes » sont traités de fascistes, ou alors, on ne les rejoint juste pas, même si on soutient à demi-mots. Parce que notre société est soumise à une hégémonie réactionnaire, aucun mouvement de la classe ne peut être pur. Notre Parti a fait, dès le début du mouvement, cette analyse, choisissant d’étudier le mouvement de l’intérieur, y voyant les contradictions et les potentialités. Notre jeune organisation s’est renforcée dans cette lutte, en apprenant des leçons décisives des masses populaires, de leur capacité à poser dés le début la question du pouvoir, à discuter de l’Etat, de la lutte violente, voire armée.
Nous présentons une première autocritique au prolétariat en soulignant que notre Parti en reconstitution et reconstruction n’a pu que de manière insuffisante synthétiser les idées des masses à une échelle supérieure, échapper à la tendance suiviste et mener de manière directe les blocages et actions des troupes de choc de notre classe. Nous aurions pu réorganiser des barrages plutôt que de s’enfermer en ville, réorganiser des manifestations en voiture si populaires, organiser des services d’ordre pour combattre les flics, organiser la violence populaire contre les politiciens corrompus, contre les patrons les plus détestés, contre les agences d’intérim ou les agences immobilières. Notre travail a été trop parcellaire, pas assez volontariste, pas assez méticuleux. Mais ce que nous avons appris et corrigé en nous forgeant dans ce mouvement, sur la direction politique nécessaire du Parti, sur la violence révolutionnaire, sur la lutte prolongée, ce sont des enseignements d’une valeur inestimable face à la reconstruction du Parti pour la guerre populaire ici, dans l’Etat français.
Aujourd’hui, le climat reste très tendu du fait des réformes anti-populaires du gouvernement Macron ; la baisse du chômage (environ 50% des chômeurs perdront entre 25% et 100% de leur allocation), la prochaine réforme des retraites, la réforme annoncée du travail de nuit dans la distribution, ou encore la mise en place de « l’allocation unique », le désastre des hôpitaux et la privatisation des services de l’Etat – faisant augmenter le coût pour les masses –, ainsi que la hausse du coût de la vie et des taxes et impôts, font et continueront à faire grimper la pauvreté et rendent le quotidien insupportable. Les attaques contre les masses sont de plus en plus violentes et directes, dans le but d’anesthésier les masses, d’empêcher toute riposte.
Dans ce contexte, le mouvement des gilets jaunes a été une étincelle face au gouvernement de la bourgeoisie impérialiste, qui a été obligée de déployer un arsenal policier et judiciaire impressionnant, plus répressif que jamais. Plus de 3000 gilets jaunes ont été condamnés et un millier a été écroué ; la popularité de la police et de la justice est en chute libre. Les lois répressives sont mises en place, les manifestations systématiquement attaquées. Les patrons ont fortement réprimé les gilets jaunes les plus enthousiastes dans de nombreuses boîtes. Plusieurs militants sont en prison pour leur engagement militant dans le mouvement des Gilets Jaunes, et nous devons de nous battre pour construire un grand Secours Rouge, pour être prêt à soutenir les masses populaires dans les mouvements qui ne manqueront pas de venir.
L’Etat, de son coté, continue à battre le fer pour les fascistes, en augmentant la puissance de l’arsenal répressif, mais aussi en soutenant l’exposition médiatique des théoriciens les plus réactionnaires, en reprenant les discours anti-immigrés du Front National (dans le but quasi-avoué de détourner la colère de la question sociale). L’Etat se prépare au fascisme d’aujourd’hui par ces transformations qui permettent au parti fasciste de se renforcer, il couvre toujours plus la corruption, renforce l’individualisme, continuant à détruire le tissu social et associatif. La gauche réformiste et même « révolutionnaire » n’est absolument pas à la hauteur des enjeux : qui, aujourd’hui, en dehors des révolutionnaires et communistes, se prépare à faire face à un régime fasciste ? Qui peut prétendre construire une organisation qui se veut assez solide pour résister à la répression ? Qui, d’ailleurs, est confronté à l’épreuve de la répression et de la prison ? La gauche actuelle est piteuse et il ne faut attendre notre salut de personne, sauf de nous-mêmes.
Nous avons donc besoin de renforcer notre organisation. Pour cela, nous devons d’abord nous mettre au service du peuple, à l’école des masses populaires. Dans les luttes, nous l’avons vu, ce sont les masses qui nous apprennent, afin que nous puissions enseigner. Notre rôle, en tant que maoïstes, est de construire le Parti Communiste et sa ligne politique, en synthétisant les idées justes, en écartant les idées fausses. Mais elles ne sortent pas de notre tête ! Il faut les apprendre des masses, puis les tester, les prouver dans la pratique, et enfin, dans un processus dialectique, en faire la ligne directrice de nos organisations, regrouper les masses autours de ces dernières, les organiser, pour donner les outils de la résistance et de la révolution. Sans nous mettre à l’école des masses, sans apprendre des méthodes de lutte, nous ne pouvons pas synthétiser. Nous avons appris des gilets jaunes, et nous devons continuer à apprendre.
Cet apprentissage n’est pas du suivisme, il est l’immersion consciente des éléments avancés du prolétariat au sein des masses populaires et de leurs luttes, afin de se saisir de toutes les luttes et de se rendre capable à diriger en étendant notre base de masse. Dans le même temps, de manière dialectique, nous devons construire le Front Uni, développer notre front d’ouvrières et d’ouvriers, mais aussi nos organisations de jeunes, de femmes et de LGBTI. C’est en prenant l’initiative, en allant à contre-courant, que nous nous forgerons comme communistes, membres du Parti de notre classe.
Sans réussir dans cette tâche centrale à la construction du Parti, nous ne pouvons pas bâtir les trois instruments de la révolution. En nous mettant au service du peuple, en synthétisant les idées justes, en les portant à un niveau supérieur, par la pratique et l’étude théorique (c’est à dire l’étude de la pratique antérieure dans le monde entier), nous devenons la fraction avancée de la classe ouvrière, nous fusionnons le Parti et l’avant-garde de la classe, nous faisons de l’avant garde subjective de la classe (comme l’a été la fraction ouvrière la plus radicale des gilets jaunes) une avant-garde objective, une avant-garde qui cherche à faire la révolution et qui s’en donne les moyens.
Le 5 décembre, une nouvelle détonation aura lieu. Elle pourrait embraser toute la plaine. Nos camarades des organisations révolutionnaires et du Parti doivent étudier l’exemple du mouvement des gilets jaunes, et prendre les devants. Nous devons nous même organiser piquets, manifestations, blocages, construire le Front et le Parti dans le feu de la lutte des classes. Faisons de Décembre 2019 une date clef dans la construction du Parti, sur le chemin de la révolution !
No comments:
Post a Comment