La santé
publique bourgeoise prend la mesure de la pandémie de COVID-19 et suit
sa progression en examinant, d’abord et avant tout, le nombre de cas
testés positifs au virus. Ensuite, ces cas sont répartis selon l’âge des
malades, certains lieux d’éclosions, les régions où ces cas sont
déclarés, les traitements médicaux qu’ils mobilisent (hospitalisations,
soins intensifs), et les guérisons ou les décès auxquels ils conduisent.
Au fond, les institutions étatiques bourgeoises ne dévoilent pas de
nombreuses informations pertinentes, soit principalement le fait qu’une
vaste partie de la population est à risque de contracter le virus sur
les lieux de travail. Les statistiques que la bourgeoisie daigne bien
rapporter servent les intérêts des capitalistes et non ceux du
prolétariat. En période de crise, la bourgeoisie a intérêt à gommer les
problèmes qui découlent de sa mainmise sur l’ensemble de la société.
Elle ne souhaite pas que les travailleurs se rendent à l’évidence,
c’est-à-dire que c’est le fonctionnement capitaliste qui rend la société
particulièrement vulnérable à de graves crises sanitaires, économiques
et politiques. Par exemple, le problème des CHSLD est un problème de
sous-financement lui-même lié au fait que l’État préfère soutenir des
secteurs profitables de l’économie plutôt que de financer des services
socialement indispensables.
La presse bourgeoise
et les autorités publiques relayent des informations imprécises et
sélectionnent celles qui s’arriment aux plans de relance économique de
la bourgeoisie. Par exemple, elles révèlent qu’il y a des foyers
d’éclosion avérés ou potentiels dans les CHSLD, les bars et les camps de
jour, et ce, sans insister sur ceux qui se déclarent sur les chantiers
de construction, dans les entrepôts, les usines, les garderies et sur
ceux qu’abriteront les écoles dans quelques semaines! En fait, souvent,
elles n’en font même pas mention! Il est plus facile de faire avaler à
la population que la COVID-19 s’en prend essentiellement aux personnes
âgées vulnérables ou aux jeunes moniteurs et fêtards égoïstes,
irresponsables et grisés par le sentiment d’invincibilité. Il est à
noter que le gouvernement et la santé publique n’ont cessé de marteler,
depuis le début du printemps, que les jeunes étaient hors de danger, les
encourageant, par le fait même, à baisser leur garde. Quoi qu’il en
soit, qu’en est-il de tous les autres malades? Personnes n’en parle,
bien entendu.
L’on remarque aussi
que les médias divulguent des informations incomplètes qui ont pour
effet de renforcer une économie nationale donnée vis-à-vis la
concurrence extérieure. Par exemple, l’on dresse la liste des pays les
plus touchés par la pandémie en ne se basant que sur les décès et les
cas d’infections en nombre absolu, ce qui a entre autres pour
effet de donner bonne mine au Québec à côté des États-Unis alors que la
réalité n’est pas aussi encourageante dans la province.
L’on constate
aisément que les autorités publiques et les médias bourgeois négligent
une donnée fondamentale : la transmission de la COVID-19 se fait souvent
sur les lieux de travail, et pas seulement ceux qui prennent en charge
les personnes âgées et les malades. D’ailleurs, Christian Dubé, ministre
québécois de la Santé et des services sociaux, admet du bout des lèvre
que du 19 au 25 juillet, 19,2% des infectés auraient contracté le virus
directement dans les milieux de travail (excluant ceux se rapportant aux
milieux de soins, aux milieux scolaires et aux services de garde).
Différentes enquêtes de la santé publique menées en Estrie révèlent que
près de 80% des jeunes de moins de 18 ans ont attrapé le virus au
contact d’une personne vivant sous le même toit. Or, près de 50% des
adultes de 18 à 49 ans (potentiellement des parents) ont été contaminés
dans leur milieu de travail (bureaux, usines, etc.) tandis que plus de
50% des aînés de 70 ans et plus l’ont été dans un centre d’hébergement.
Ces statistiques ne reflètent probablement pas fidèlement la réalité
complexe qu’elles tentent de décrire, mais elle s’avèrent tout de même
révélatrices de certaines tendances. Il faut garder en tête que la
transmission en milieu de travail est une conséquence directe de la
relance économique précipitée et imprudente orchestrée par la
bourgeoisie. Pourtant, le ministre clame que « [l]e virus se répand
majoritairement en communauté et par la famille. » Ce qu’il ne nous dit
pas, c’est que lorsque le virus est contracté dans la famille, il a été
contracté par un membre de la famille à l’extérieur de la cellule
familiale (soit, dans bien des cas, au travail) avant qu’il ne soit
transmis à des proches. Plus encore, même les lieux de transmission qui
ne sont pas considérés comme des milieux de travail, mais comme des
lieux de transmission communautaires (comme les bars) sont des espaces
qui ont été rouverts dans la foulée de la relance économique, et ce,
dans le but précis de relancer l’accumulation de profits : leur
fréquentation a été souhaitée et encouragée par le gouvernement
lui-même.
Les cas de
contamination sur les lieux de travail sont non-négligeables. Récemment,
après avoir appris que trois ouvriers avaient contracté le virus, la
scierie des Outardes à la Manicouagan (propriété de Produits forestiers
Résolu) a dû fermer ses portes afin de permettre la désinfection des
lieux et le dépistage de ses 120 employés. Dans la même veine, le 11
juillet dernier, l’on apprenait que les cas de contamination étaient en
hausse à l’hôpital de Saint-Jérôme dans les Basses-Laurentides. En
effet, l’hôpital a fait état de treize employés supplémentaires atteints
de la COVID-19, ce qui portait à 84 le nombre total de travailleurs
infectés depuis le mois de juin, et ce, sans compter que plus de 75
patients avaient contracté la maladie dans l’établissement durant la
même période. D’ailleurs, dans les dernières semaines, la Fédération
canadienne des syndicats d’infirmières et infirmiers (FCSII)
s’inquiétait du taux élevé d’infection à la COVID-19 chez ses membres,
constatant que près de 19% des cas d’infection au pays, soit 16 000
personnes, concernaient des travailleurs de la santé.
Selon le rapport de
l’Agence de la santé publique du Canada couvrant la période allant du 14
au 18 juillet 2020, parmi les 102 301 cas canadiens d’infection dont
l’information sur l’exposition a été fournie, l’on recensait 57 922 cas
(57%) dont l’origine était attribuable à une exposition de source connue
en territoire canadien, alors que 34 206 cas (33%) étaient attribuables
à une source inconnue, mais toujours en territoire canadien. Voilà qui
nous indique que la transmission de la COVID-19 se fait avant tout
localement. Il y a donc de quoi se méfier des milieux de travail
ré-ouverts et non pas seulement des destinations voyage. En plus,
personne ne peut ignorer que les lieux de travail sont souvent des
milieux fermés, mal aérés, souvent mal équipés et surpeuplés (où la
distanciation est impossible à appliquer en tout temps). L’on pense aux
terres agricoles, aux abattoirs, aux chaînes de montage, aux bureaux,
aux CPE et aux écoles, aux commerces, aux salons, aux lieux
d’approvisionnement, aux bars et aux restaurants, etc. Avec la relance
de l’ensemble des activités économiques, les éclosions ne vont que
continuer de se multiplier, mettant en danger la vie de millions de
prolétaires au pays.
Ainsi donc, la
statistique bourgeoise tend à occulter la situation réelle vécue par les
prolétaires canadiens. Les moyens de collecte, de recension, de
comptabilisation et d’analyse de données doivent être mis au service de
ceux qui font fonctionner la société et non pas de ceux qui profitent du
travail des autres pour s’enrichir, comme c’est le cas présentement. Au
Canada, c’est le prolétariat qui produit la richesse, et cette richesse
devrait servir à améliorer ses conditions de vie. Inversement, la
bourgeoisie n’est qu’une classe parasitaire qui ne produit rien d’utile à
la société; ses intérêts doivent être combattus.
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