Thursday, September 14, 2017

Canada for debat - Partisan - Pas suffisant d’être anticapitaliste!



Le capitalisme génère sa propre opposition: ceux et celles qui subissent l’exploitation, ceux et celles qui ne font qu’y assister en observateurs, n’ont pas attendu le socialisme scientifique de Marx et Engels pour s’y opposer. Avant même que le terme de «communisme» ne s’impose, avant qu’on ne saisisse le fonctionnement du capital, on s’en prenait déjà, sur un mode plus ou moins moral, à l’exploitation des travailleurs et des travailleuses par la bourgeoisie.
Aujourd’hui, à l’heure où la bourgeoisie tente encore, envers et contre tout, de proclamer la «fin de l’histoire» et celle du socialisme, cette vieille tendance reprend du poil de la bête. Une pléthore de tendances plus ou moins clairement définies se regroupe désormais sous l’éventail de
l’anticapitalisme. En un sens, c’est louable: on ne reprochera à personne de s’élever contre les crimes de la classe dominante. Pourtant aujourd’hui, alors que le socialisme a connu ses premiers grands succès en Union soviétique et en Chine, et que les révolutionnaires, à travers le monde, visent à le rétablir et le mener plus loin encore, cette étiquette d’«anticapitaliste» est profondément insuffisante.
D’entrée de jeu, on peut relever l’aspect strictement défensif de l’approche «anticapitaliste». Quand on y souscrit, on sait, certes, contre quoi on lutte (le capitalisme, dont on comprendra alors plus ou moins les tenants et aboutissants), mais plus rarement ce qu’on a d’autre à offrir. On se retrouve alors à dénoncer «les boss pourris», «les banques», «les crosseurs» de façon presque rituelle, sans chercher à organiser la prochaine grande percée révolutionnaire ni à transformer réellement la situation à laquelle on fait face. Cet anticapitalisme-là prend la forme d’une indignation morale, d’un rejet préliminaire, encore insuffisant de l’exploitation à laquelle on fait face. Il évoque un peu l’indignation de la gauche réformiste face aux «multinationales», à la «mondialisation», etc., à cela près que les réformistes s’organisent pour essayer d’obtenir quelques miettes là où l’anticapitalisme ne peut que se cantonner à la seule dénonciation.
Malgré tout, ces grandes lignes mobilisent un certain nombre de personnes, et atteignent même parfois des travailleurs et travailleuses. On peut y voir, alors, une étape préliminaire, une première avancée: savoir qu’on veut lutter contre le capitalisme, c’est un bon début. Le reste viendra. Ce qui est plus grave, c’est lorsque des intellectuelLEs cherchent à théoriser ce vide, à y ériger des systèmes «alternatifs» et utopiques – autant de châteaux de cartes –, à faire d’un mouvement spontané qui tourne en rond depuis plusieurs décennies une fin en soi, à prouver envers et contre tout qu’il se suffit à lui-même.
Ces théoricienNEs du dimanche qui encensent jusqu’à plus soif l’«organisation horizontale», les «résistances multiformes», qui insistent pour tenter de «changer le monde sans prendre le pouvoir» font plus de mal qu’il n’y paraît. Quand on affirme, avec les tribunes médiatiques que ces gens-là arrivent parfois à grappiller par-ci par-là, qu’aujourd’hui, pour se défendre contre le capitalisme, il faut ne pas s’organiser, ne pas s’unir, ne pas s’emparer du pouvoir, on dit aux forçats du capitalisme: «Faites de votre impuissance actuelle un principe! Vous verrez, ça ira tout de suite mieux.» Ce n’est rien de moins qu’un rejet des nécessités pratiques de la lutte révolutionnaire, un rejet de son objectif même ; autrement dit, une trahison.
C’est que le capitalisme n’est pas un «système» abstrait, mais un mode de production qui est tributaire d’une certaine organisation sociale (qui permet, entre autres choses, à une classe sociale dominante, la bourgeoisie, de s’accaparer la vaste majorité des moyens de production dont la société a besoin pour fonctionner) et qui se dote de moyens de se maintenir en place face à la contestation qu’il entraîne inévitablement, par exemple l’État, la police, l’armée. Ce qu’il faut faire, pour y mettre un terme, ce n’est pas seulement le dénoncer, pas seulement lancer quelques slogans, mais s’attaquer concrètement à ses présupposés et à ses institutions.
Le socialisme met fin à l’organisation sociale qui a permis le capitalisme. Il abolit la propriété privée des moyens de production et, ce faisant, il rend à la vaste majorité le pouvoir sur sa propre vie et sur la société ; il lui donne le pouvoir politique. La lutte pour l’instauration du socialisme, elle, attaque de front l’État bourgeois et s’en prend à la police et l’armée. Pour ce faire, elle construit le pouvoir rouge et ouvrier, elle organise sa propre armée, elle arrache la nouvelle société des griffes de l’ancienne.
On voit déjà que le socialisme se prête bien à une démarche planifiée, méthodique. La construction de notre parti révolutionnaire (avec tout le réseau de propagande, tous les dispositifs que ça implique), la lutte contre la bourgeoisie, pour le pouvoir, puis enfin la lutte pour éliminer ce que le capitalisme nous aura laissé de pourri en héritage, voilà autant de choses que l’on peut décomposer en objectifs immédiatement atteignables. Par conséquent, ce que le simple anticapitalisme ne peut que dénoncer, le socialisme l’abolit.
C’est là une perspective plus réjouissante que la dénonciation, justifiée mais stérile, des méfaits du capitalisme. On l’a vu par le passé, on le voit encore dans d’autres pays et on le reverra ici dans un avenir proche: puisque le socialisme rend au prolétariat, aux millions de travailleurs et de travailleuses qui bâtissent la société et la maintiennent en état de marche, le pouvoir et la dignité que le capitalisme leur vole, il soulève les foules. Il mobilise toute une classe sociale dans la lutte pour sa propre libération, et il l’unifie autour des perspectives qui lui sont communes.
Encore plus qu’auparavant, nous avons besoin de clarté, de cohésion et de détermination pour mettre un terme à la domination de la bourgeoisie, cette classe parasitaire, sur notre société et notre classe. Alors, n’hésitons jamais à nous revendiquer socialistes et à défendre nos perspectives. Elles sont nos premières armes, même si elles ne seront pas les dernières!
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