Hypothèse #1 du Mouvement étudiant révolutionnaire: Une expérience de lutte importante
22
juillet 2012
Dans le cadre de ses hypothèses de travail sur la grève étudiante, le MER
affirme que la lutte des derniers mois constitue un moment important dans la
lutte politique; plus encore, que cette lutte représente un saut en avant dans
la pratique politique des masses qui pourrait changer certains paramètres de la
lutte des classes au Québec, avec certaines répercussions pour le Canada. Les premiers mandats de grève pris en février, les actions menées
par des groupes de militantEs étudiantEs ou lors des actions de masse –
quelque chose a changé dans le paysage politique, quelque chose qui permet de
changer la situation actuelle et qui a la potentialité de changer beaucoup de
choses dans l’avenir.
La grève étudiante de 2012 est assurément le plus grand mouvement de la jeunesse qui ait existé au Québec. Encore plus que cela, le mouvement de grève aura aussi eu comme conséquence de bouleverser les plans électoraux du gouvernement, de mettre-à-mal la classe politique dans son ensemble en plus d’ouvrir une crise politique et sociale importante. Peu importe les moyens utilisés – on n’a qu’à penser aux lois répressives, à la violence policière, aux menaces, aux éditoriaux complaisants, etc.) – rien n’aura réussi à détourner la lutte étudiante de son combat. En ce sens, le refus de se résigner aux diktats du gouvernement, la volonté de combattre jusqu’à volontairement assumer la rupture du consensus social bourgeois auront été des éléments majeurs qui auront permis au mouvement étudiant de conserver une liberté d’action et une marge de manœuvre que les directions syndicales du mouvement ouvrier ont abandonnées depuis fort longtemps. Au niveau pratique, le mouvement de grève a été l’occasion pour des milliers d’étudiants et d’étudiantes d’accumuler une expérience de lutte, et ce dans un temps record, d’une richesse exceptionnelle – tant dans les formes utilisées que dans l’étendue prise par celles-ci – qui reste encore à être pleinement mise de l’avant. Partout, de Gatineau à Rimouski, ce sont des milliers d’étudiants et d’étudiantes qui ont œuvré à organiser la grève sur les campus, qui ont tenu les piquets, participé aux assemblées générales et aux manifestations de masse, mis en place des actions de perturbation économique et lutté de façon parfois très radicale. Face aux vieilles stratégies du gouvernement, un mouvement étudiant bien différent. Le gouvernement a cru qu’en laissant pourrir le conflit, il réussirait à diviser le mouvement étudiant. Pour ce faire, il s’est appuyé sur la cabale médiatique de ses larbins qui sévissent depuis trop longtemps dans la presse de masse – les Martineau et Pratte de ce monde – et aussi sur la judiciarisation du conflit. Les buts du gouvernement étaient simples: plus l’échéance de terminer la session se ferait sentir et l’obligation d’avoir un travail d’été se rapprocherait, plus le mouvement étudiant en viendrait à se diviser. La vieille stratégie du gouvernement a lamentablement échoué. Non seulement le mouvement étudiant ne s’est pas encore divisé, mais le mouvement étudiant réformiste le plus combatif, la CLASSE, à travers les assemblées générales et la participation massive des étudiants et étudiantes, a réussi à conserver la direction de la lutte et maintenir l’unité des étudiants et étudiantes contre le gouvernement. Dans les cégeps – véritables centres de la lutte – la composition plus largement prolétarienne a contribué à maintenir le niveau de combativité élevée. La crainte de perdre la session ou de ne pas trouver un emploi s’est révélée inopérante; en effet, l’appauvrissement généralisé de la population au cours des 20 dernières années et la crise du capitalisme ont fait apparaître de nouvelles réalités; d’une part, une grande majorité d’étudiantEs sont salariéEs pendant toute l’année pour financer leurs études et leur vie, d’autre part, beaucoup d’autres sont habituéEs aux emplois précaires, temporaires, aux jobs de dernière minute et au chômage. Contrairement à 2005, où la gauche réformiste combattive avait été minorisée et les éléments les plus radicaux tassés, le mouvement de 2012 est en mesure de s’appuyer sur une synthèse des expériences positives des mouvements les plus combatifs des dernières années, mouvements très souvent influencés par l’anticapitalisme. Dans beaucoup de campus, on retrouve des éléments qui se revendiquent de l’anarchisme ou du communisme à la différence près qu’aujourd’hui, certainEs parmi ces éléments expriment ouvertement leurs orientations politiques et leurs propositions dans les assemblées générales et dans les manifestations. Ce faisant, il s’est construit jour après jour un noyau dur d’étudiants et d’étudiantes prêts à s’engager dans la durée du conflit et jusqu’aux actions les plus risquées. Des mesures d’austérité à la grève, de la grève à la crise sociale! Un élément important de la lutte étudiante, c’est la volonté de plusieurs militantEs dans les associations étudiantes de chercher à élargir la lutte en dehors de la seule lutte contre l’augmentation des frais de scolarité. Avec la grève, paradoxalement, les étudiantEs ont ouvert les campus vers l’extérieur. IsoléEs dans des lieux qui normalement sont réservés à une minorité, les campus de cégeps et d’universités sont généralement des lieux clos desquels les étudiantEs contemplent le monde extérieur plutôt qu’ils ne cherchent à le transformer, comme nous y invitait Marx dans ses Thèses sur Feuerbach. La liaison des étudiantEs aux autres couches du peuple s’est traduite par l’incorporation de revendications dépassant la seule lutte contre les frais de scolarité. Les étudiants et étudiantes à travers leurs assemblées générales ne se sont pas contentés de discuter des actions à mener, ils et elles ont aussi adopté des propositions touchant un ensemble de questions politiques et sociales ainsi que de nombreuses revendications à caractère économique dans le but de satisfaire les besoins des masses. Loin de s’enfermer dans une lutte strictement étudiante, ces revendications, quoique ignorées en général par les médias bourgeois, ont permis quelques fois des débats de fond sur le capitalisme. L’idée à commencer à germer; il est possible, même avec toutes les difficultés que cela peut comporter, de procéder à l’élaboration commune d’un projet réussissant à exprimer peu à peu le ras-le-bol face au système capitaliste. Avec la loi 12 (ou projet de loi 78) et la fermeture des campus les plus durement touchés par la grève, il semble que chacunE cherche, avance en zone inconnu, tâtonne afin de lier toutes les initiatives et propositions politiques. Comment composer à partir de tous ces feux qui se sont allumés dans le cadre de la lutte pour qu’ils mettent durablement le feu à la prairie plutôt qu’ils ne se consument sans laisser de trace? Inscrire le mouvement dans la durée, voilà la tâche qui est devant nous. Il faut s’assurer que le mouvement puisse se poursuivre et qu’il puisse développer sa mobilisation à partir d’initiatives et de propositions politiques supérieures à celles qui existent pour le moment. Ces propositions devront permettre de lier ensemble les différentes luttes (et formes de lutte) menées par les différentes sections des masses; autrement dit, elle devront établir une rupture plus nette avec le fonctionnement «normal» du capitalisme et aboutir à une critique constructive que ce soit à travers les actions, mais aussi dans la critique du parlementarisme bourgeois, débouchant sur un mouvement qui ne périclite pas au premier coup dur. À travers les assemblées et réunions diverses, des milliers d’étudiants et étudiantes ont commencé à entrevoir qu’il était possible de commencer à construire une société différente, qu’on n’était pas obligé de passer par le parlement ni par les élections. Nombreux et nombreuses sont les étudiantEs qui aujourd’hui pensent qu’il est temps de construire une société plus juste, qui soit fondée sur autre chose que la recherche du profit maximum. Les manœuvres de diversion du gouvernement Charest, notamment ses apparitions télévisées, sa chasse véhémente à la violence et à l’intimidation n’ont en rien ralenti le mouvement de contestation, au point où même les affrontements les plus importants avec la police ont souvent impliqué des centaines, voire des milliers d’étudiantEs. Pour se faire une idée, il suffit de penser aux manifestations entourant le Plan Nord à Montréal et au congrès du PLQ à Victoriaville. C’est à partir de cette expérience que le MER-PCR entend poursuivre son travail de construction. Le MER-PCR, c’est bien sûr des militantEs étudiantEs maoïstes, mais c’est plus que cela. Le MER c’est le projet d’unifier l’ensemble des étudiantEs qui adhèrent à l’idée de combattre le capitalisme sous toutes ses formes et qui cherchent à lier leur combat à celui de la jeunesse prolétarienne. Au moment de faire un bilan partiel du mouvement de lutte, le MER c’est aussi un appel à tous ceux et à toutes celles qui voudront discuter, échanger, tirer les conséquences politiques d’un tel bilan. Pour nous, l’expérience accumulée nous apparaît plutôt liée aux nouvelles pratiques qui au cours de la lutte ont été élaborées collectivement (que ce soit par de petits groupes ou à travers les AGE). Le Mouvement étudiant révolutionnaire (MER-PCR) (17 juillet 2012) www.mer-pcr.com |
No comments:
Post a Comment