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Les prisons sont supposées être des
lieux où les gens sont enfermés en tant que punition pour les crimes
commis. Mais, selon cette détenue, les femmes détenues sont traitées
différemment – et pire – que les hommes.
Angela Sontakey est prisonnière à la
prison de Byculla. Prétendument maoïste, l’ancien professeur de
sociologie a été arrêtée et incarcérée en Avril 2012. Elle a d’abord été
écrouée à la prison centrale de Nagpur et à la prison de Gondia avant
d’être déplacée vers Byculla.
L’an dernier, elle a protesté contre le
projet d’installation de caméras de vidéosurveillance dans les cellules
des femmes. Dans une interview manuscrite à The Hindu, transmise par ses
avocats, elle parle des conditions de détention à l’intérieur de la
prison et des problèmes rencontrés par les femmes détenues. Elle met en
garde le lecteur: «Je vous écris en fonction de mon accès, de mes
expériences et de ma compréhension limités. » Ses réponses ont été
légèrement modifiées pour plus de clarté.
Quelle sont les conditions de
détentions des femmes dans les prisons de Byculla et de Nagpur? Quels
sont les problèmes rencontrés par les femmes détenues?
À Byculla, ainsi que dans la prison de
Nagpur, les femmes prisonnières ont beaucoup moins de liberté de
mouvement par rapport aux prisonniers de sexe masculin. Alors que les
hommes peuvent aller librement au département judiciaire, les femmes ne
le peuvent pas. Elles doivent compter sur le personnel de la prison des
femmes pour obtenir des informations.
Le corps des femmes est toujours au
centre chaque fois qu’un homme est autour. Il existe cette pratique
odieuse, selon laquelle le premier jour où une détenue femme doit se
présenter [appelé « mulayaja »] devant le surintendant de la prison,
elle doit enlever ses chaussures et est forcée de se couvrir la tête
avec un Pallu ou dupatta. Lorsqu’elle demande pourquoi, différentes
réponses ont été données. Une femme geôlière a répondu que c’était notre
culture. Un autre officier a estimé que ça servait à maintenir la
discipline. Un troisième a nié que cette pratique existe.
Dans la prison Nagpur, lorsqu’un homme va
venir à la section des femmes, les femmes sont repoussées et entassées
dans un coin. J’ai vu une femme d’âge moyen qui portait un salwar kameez
et qui attendait d’être présentée au tribunal à qui le personnel de la
prison a demandé de se changer pour passer un sari (habit sans pantalon
NDT).
Ensuite, la quantité de savon donnée aux
hommes et aux femmes est la même pour les deux savons que ce soit de
toilette et pour laver les vêtements. Les femmes ont leurs règles; ça
devrait être pris en compte et les femmes devraient obtenir plus de
savon pour elles-mêmes et pour laver leurs vêtements. Il y a toujours un
manque de serviettes hygiéniques: à partir de mars 2014, six serviettes
sont données tous les mois; cette quantité est insuffisante. Ceux qui
sont chargés de la distribution soit ne sont pas présents ou alors ils
disent que les serviettes sont en nombre insuffisant. Avant, le
personnel demandait aux détenus de se déshabiller pour montrer si elles
avaient leurs règles. Cette pratique a été arrêtée après que des
plaintes.
Ensuite, il y a ‘open zadti’ [dans
laquelle la détenue est examinée nue], la censure des journaux, le
manque de livres en prison et aucune installation de téléphonie.
Avez-vous remarqué une différence dans la façon dont les hommes et les femmes détenues sont traitées?
La quantité de nourriture donnée aux
prisonniers hommes et femmes diffère. Le motif est que les femmes
mangent moins que les hommes. Nous exigeons que les femmes aient la même
quantité de nourriture. D’une part, 90 pour cent des femmes indiennes
sont anémiques et d’autre part, il y a une forte disparité entre les
personnes.
Nous pouvons également voir la différence
dans ce qu’il est enseigné aux hommes et aux femmes dans les prisons.
Dans la prison de Nagpur, les hommes apprennent la menuiserie, le
développement du leadership, la manière de prononcer des discours, etc.
Les femmes suivent des cours de choses typiquement « féminines » comme
la couture, le tricot, la broderie, le rangoli (peinture au sol NDT), la
peinture et la fabrication d’objets décoratifs, ainsi que services
proposés dans les salons de beauté. La seule exception est le cours
d’informatique géré par une ONG.
Quelle est la condition des enfants des femmes détenues à la prison?
Les enfants de plus de six ans sont mis
dans des foyers pour enfants, mais les mères qui n’ont personne pour
s’occuper de leurs enfants les gardent avec elles. La plupart de ces
femmes sont originaires du Bangladesh.
Alors que la nourriture donnée aux
enfants peut sembler suffisante pour les petits, quelques-uns des
enfants [plus âgés] ont faim. Les enfants se réveillent au milieu de la
nuit et pleurent de faim. En 2011, ils leur donnaient du givenpav (pain)
pour manger, mais il a été brusquement arrêté en 2012.
Il y a des petites balwadis (écoles pour
les pauvres NDT) hors de la prison. Parfois, les ONG donnent des
vêtements, des assiettes en plastique, des tasses, des verres. Il est
douloureux de voir les enfants s’en séparer quand ils doivent partir.
Nous voyons des enfants qui jouent à Bandi-Bandi [prisonnier
prisonnier], mais jamais à «enseignant -enseignant », même s’ils vont à
l’école; tel est l’impact sur leurs esprits impressionnables. Dans la
prison de Byculla, il n’y a aucune aire de jeux pour les enfants. Ils
sont confinés dans une petite zone, surpeuplée.
Comment les détenus répondent à leurs besoins quotidiens?
Il y a un prix pour tout. S’il y a des
messages à transmettre, une mulakat [parloir avec la famille] à
organiser, qu’elle dure plus de temps, des vêtements ou des produits
alimentaires spéciaux à obtenir, des visites à l’hôpital et des gardes
d’escorte à organiser, il y a un prix.
Les autorités volent les détenues durant
les zadti [fouilles] quand elles sont présentées à la cour ou vont à
l’hôpital. Ils prennent l’huile, les bananes, le sucre de palme et
l’arachide des femmes enceintes; les œufs, le lait et les vêtements
destinés aux enfants et aux patients, les choses que nous achetons à la
cantine avec notre propre argent, les nécessaires donnés par les ONG.
Les parents et amis qui viennent visiter les détenus sont invités à
«mettre quelque chose dans le plastique ». Ils prennent même les carnets
de certains détenus créatifs dans lesquels ils auraient pu écrire des
poèmes.
Étant prisonnière, il est difficile de
prouver sur le papier, mais il ne faut pas beaucoup d’efforts pour
savoir qu’un mandat pour un détenu n’est pas enregistré dans le
registre.
La différence de classe est évidente. Les
détenus riches obtiennent plus de facilités; ils peuvent contourner les
règles et sont traités comme des VIP. Les détenus pauvres sont injuriés
et traités comme des animaux. En 2012, une caserne de Cercle 1 a été
évacuée tôt le matin, car une accusée d’assassinat de haute origine ne
voulait voir personne à part ses servantes.
Les femmes-déesses auto-proclamées,
affirmant conjurer le mal, obtiennent également un traitement spécial du
personnel de la prison.
Avez-vous remarqué des cas de mauvais traitements en prison?
Les détenues sont montées les unes contre
les autres pour les diviser. Les criminelles habituelles sont utilisées
par le personnel pour contrôler d’autres détenues. Elles dictent leurs
conditions et constituent plus une extension du personnel.
Seules, celles qui sont en bons termes
avec les autorités, celles qui espionnent pour elles, les payent ou
d’abusent d’autres détenus à leur place, sont autorisées à sortir
librement. Depuis ces deux dernières années, les passages à tabac sont
devenus réguliers. Les détenus sont soit réduites au silence ou forcées à
faire de fausses déclarations. [ma codétenue] Varsha a été contrainte
de dire qu’elle était tombée quand elle a été emmenée à l’hôpital JJ.
Les autorités pénitentiaires surveillent
celles qui déposent des lettres de plainte dans la boîte pour le juge ou
le commissaire et les menacent. Elles prennent également des lettres
dans les boîtes de plainte en utilisant une longue et mince tige en fer
qu’elles passent à travers la fente de la boîte. Du 2 au 25 Avril 2015,
je suis restée dans une baraque séparée comme punition parce que je
protestais contre l’installation de caméras de vidéosurveillance.
Les détenues ne sont pas produites devant
les tribunaux pendant des mois. La moindre raison suffit à dire que les
gardes ne sont pas disponibles: un match de cricket, la visite d’un
dignitaire, des festivals, même des précipitations. Les détenues ont
fait des demandes aux autorités, se sont révoltées individuellement et
ont appelé à des grèves pour attirer l’attention sur ce problème, mais
il est toujours là. Le 26 décembre 2011, les femmes détenues ont fait
une grève d’une journée pour exiger des gardes d’escorte pour pouvoir
assister aux audiences.
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