Pas d'union nationale avec les réactionnaires et les bourgeois-e-s !
Si nous ne pleurons ni les policiers, ni les caricaturistes, nous condamnons tout de même ces attentats. Si nous considérons que les caricatures de Charlie Hebdo étaient islamophobes, sexistes, racistes nous considérons aussi que cet attentat n’était pas de la justice de classe. Nous considérons la violence révolutionnaire légitime et cette tuerie n’était pas de la violence révolutionnaire. D'autant plus que ni un correcteur, ni un agent de nettoyage n'étaient responsables de ce que publiait Charlie Hebdo. Ni les clients d'une supérette responsables de l'impérialisme français. La mort d'hommes et de femmes est une chose triste. Nous comprenons l'émotion sucitée par cet attentat.
Mais nous ne sommes pas Charlie. La campagne en cours efface tout le passif de l'hebdomadaire. Or ce passif était lourd.
Ce n'est pas la "liberté d'expression" qui a été attaqué, concept que nous jugeons artificiel, mais une rédaction en guerre contre l'islam et les ennemis de l'impérialisme français. Nous ne pouvons pas déconnecter la ligne éditoriale de Charlie Hebdo de la lutte des classes. Car c'est bien la lutte des classes qui motivait cette ligne éditoriale. Et dans cette lutte, nous n'étions pas dans le même camp. Cette guerre, ce n’est pas la nôtre.
Oui, la France est déjà un pays en guerre.
L’appétit insatiable des impérialistes français, dans une situation de crise du capitalisme, et la concurrence des autres impérialismes ont amené notre pays à une série d’interventions militaires ces dernières années.
A part pour la part d’entre nous qui a fui le chaos et la violence engendrés par ces guerres pour venir en France, nous ne sommes pas habitué-e-s à en subir les conséquences meurtrières. Nous sommes plutôt habitué-e-s, pour une large partie d’entre nous, à bénéficier des profits engendrés par le pillage des pays dominé-e-s par la France.
Ces pillages, des mort-e-s, il en fait chaque jour. On meurt de la sur-exploitation, de la misère, à cause de la France. On meurt de la répression mise en place par les régimes à son service. On meurt à cause du chaos engendré par les impérialistes.
Les branches les plus réactionnaires de l’islam ont toujours été utilisées par les impérialistes pour lutter contre la volonté d’émancipation des peuples face à l’impérialisme, formenter des troubles, armer ces groupes pour les utiliser comme mercenaires. Ces dernières années, les conséquences des jeux de billards à trois bandes des impérialistes ont semé le chaos, en Syrie, en Irak, en Lybie, au Mali. Ce sont les populations locales qui en sont les premières victimes, mais les impérialistes subissent parfois eux aussi un retour de bâton.
Quand bien même les auteurs de la tuerie sont de purs produits des contradictions internes à la France, on ne peut faire l’impasse de replacer celle-ci dans un contexte international. L’Unité Nationale à laquelle appelle la bourgeoisie, c’est une unité face à une menace extérieure. Toujours la même histoire, celle qui a servi à justifier la colonisation : celle d’une France des Lumières, portant un message universel de démocratie, de civilisation, de liberté d’expression, face à des pays dominés présentés comme barbares, obscurantistes.
Cette tuerie est une humiliation pour la France, elle porte sur son territoire la violence armée. C’est systématiquement, des Versaillais aux Vichystes, dans ces situations d’humiliation nationale qu’est tapie la réaction la plus moisie dans notre pays.
Ces situations d’humiliation, de « drame national », sont utilisées par la bourgeoisie pour rallier les masses à elle. Elles font basculer les positions, elles révèlent le chauvinisme et le racisme présent dans des organisations soit disant progressistes. A l’heure où les interventions militaires de la France ne soulèvent plus l’opposition des organisations traditionnelles de la classe ouvrière, car ces organisations vivent au crochet de l’impérialisme, le ralliement est quasi-total.
Quand on attaque une partie d’entre nous, c’est nous tous et toutes qui en subissons les conséquences
C’est aussi pour l’ensemble du prolétariat de l’Etat français que l’Unité Nationale est dangereuse. La bourgeoisie désigne parmi les classes populaires une 5ème colonne, un ennemi intérieur, tout trouvé aujourd’hui.
Oui, en France, aujourd’hui, il existe d’énormes contradictions, dans une situation de crise du capitalisme, du fait de la nature impérialiste de notre pays, du fait de l’importation massive par les capitalistes d’une main d’œuvre issue des pays dominés, du fait qu’une partie d’entre nous vit des profits générés par l’impérialisme.
Effacer chez nous toute compréhension de la nature de ces contradictions est un objectif pour la bourgeoisie. Elle « cherche à substituer aux forces motrices réelles de l'histoire des forces motrices imaginaires ; aux classes, les races ; à la lutte des classes, la lutte des races » Elle cherche à « recréer (…) les ténèbres dans les consciences, au moins dans celles des couches les plus arriérées de la société. Et c'est ainsi que naît le racisme, dont tous les « mythes » correspondent à un double but : combiner la force et la ruse, pour mettre dans la conscience des hommes des illusions qui les rendent soumis au capital et prêts à la guerre impérialiste. Ils se sont orientés vers l'idée de race. Par là doit se perdre la connaissance la plus importante, celle du rôle de l'économie. Par là doit se perdre la notion fondamentale de classe. Par là doit se perdre la connaissance que le marxisme a apportée aux travailleurs des lois de l'évolution de la société, la connaissance du moyen de sortir de la société capitaliste. »
Dans le contexte actuel, l’organisation, la conscience de classe sont affaiblies par des décennies de trahison des organisations traditionnelles de la classe ouvrière. La bourgeoisie a le champ libre pour créer la confusion dans nos esprits. Elle cherche à tourner la majorité d’entre nous contre les musulman-e-s, en prenant appui sur les positions arriérées racistes et colonialistes qui peuvent exister dans les classes populaires. Elle construit une identité nationale réactionnaire basée sur l’exclusion des musulman-e-s, des immigré-e-s. Elle divise notre camp, elle exige de nous que nous nous rallions à elle, que nous applaudissions la répression, la présence policière massive en instillant la peur dans nos esprits.
Les caricatures de Charlie Hebdo participaient, sous couvert de satire progressiste, à cette vaste entreprise réactionnaire politique, médiatique, de rejet des musulman-e-s. Ces caricatures avaient des conséquences dans le monde réel : exclusion des femmes voilées du monde du travail, violentes agressions contre les musulman-e-s, lieux de culte, cimetières saccagés.
Elle diffuse chez ceux chez qui sont exclus de cette définition de l’identité nationale des théories complotistes qui ne permettent pas de comprendre ce qui se passe dans notre société et annihilent toute perspective de lutte. Les sectes dans lesquelles certain-e-s d’entre nous trouvent refuge n’amèneront ni progrès, ni liberté, ni victoires. En Irak, en Syrie et en Lybie, nous les voyons à l’œuvre.
Il n’y a pas besoin de complot pour que les choses partent à la dérive, le capitalisme et la bourgeoisie ont créé les conditions de l’expression d’une violence armée dans ce pays.
Cette violence armée, c'est l'impérialisme français qui l'a amenée sur son sol.
La France est donc en guerre. Cette guerre n’est pas la nôtre. A nous de savoir construire notre propre camp, mener nos propres batailles. Notre bataille, aujourd’hui, c’est d’être solidaires avec les musulman-e-s, objet d’une campagne de haine mettant en danger leur vie. Notre bataille, c’est de construire l’unité des classes populaires.
Nous dénonçons également le dispositif policier mis en place suite à ces attentats qui touche l’ensemble des classes populaires. Quand on attaque une partie d’entre nous (ici, les musulman-e-s), c’est sur tous que les conséquences retombent.
De même, nous n’avons pas intérêt à ce que la police et les services secrets français soient efficaces dans la lutte anti-terroriste. Nous ne nous félicitons pas de la mort des auteurs de la fusillade de Charlie Hebdo ni de Coulibaly. Nous avons beaucoup plus à craindre du fichage généralisé, de la présence policière massive que des attentats. Nous avons beaucoup plus à craindre de l’anti-terrorisme que du terrorisme.
Le gouvernement français invite les dirigeant-e-s bourgeois-e-s à participer à des rassemblements, et à des manifestations en mémoire à Charlie Hebdo. Tout les partis bourgeois, du Front de Gauche, au Front National, appellent à s'y rendre.
La manifestation du dimanche 11 janvier à Paris réunira tous les dirigeants impérialistes du monde, les chiens de garde de la France, au nom de la liberté d’expression.
Bien entendu, nous ne nous rendrons dans aucune de ces manifestations. Nous ne céderons pas aux injonctions à la solidarité avec des caricaturistes qui étaient nos ennemis.
Non aux plans vigipirate, non au fichage, aux appels à la délation !
L’Unité
qu’il nous faut, c’est celle des classes populaires ! Face à
l’islamophobie, solidarité avec les musulman-e-s de l’Etat français !
Abrogation des lois islamophobes !
Dans cette période difficile, ne cédons pas aux appels à l’unité nationale ! Notre camp, c’est celui du prolétariat !
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