Nous
procédons ici à la recension de dix faits entourant la relance
économique. Ces faits concernent le développement de lutte des classes
et de l’épidémie de COVID-19 au Québec et au Canada. Même s’il s’agit
d’un survol, les appréhender nous permet d’entrevoir ce qui nous attend
dans les semaines à venir. C’est également une manière de poursuivre les
analyses entamées par notre journal dans les dernières semaines, celles
portant sur la concurrence internationale au cœur de la pandémie, sur la gestion criminelle de l’épidémie par l’État bourgeois et son exécutif, sur la double fonction (santé/répression) de l’état d’urgence sanitaire, sur les intérêts réels à l’origine du déconfinement précipité, ainsi que sur la situation économique à l’échelle mondiale.
Les dix éléments recensés ci-dessous nous renseignent sur les
conditions d’ensemble de la société au sortir de la « pause
économique », de même que sur l’état général de l’affrontement entre les
classes sociales.
1) La relance économique et le déconfinement, alors que la situation n’est pas contrôlée, vont mettre en danger les travailleurs
La relance économique survient non pas grâce à la maîtrise durable de la situation sanitaire, mais plutôt en raison de la pression exercée par la concurrence internationale et de la nécessité de relancer l’accumulation de profits au Québec comme ailleurs. Le tout a mis fin abruptement à la trêve commune adoptée par les capitalistes à travers le monde. La relance économique, alors que l’épidémie n’est pas sous contrôle, va mettre en danger des millions de travailleurs qui feront face à des conditions de travail de plus en plus dangereuses. Avec la réouverture des écoles et des lieux de travail, nous assisterons inévitablement à l’aggravation de la propagation du virus. Le retour au travail sera forcé pour de nombreux prolétaires : ils se buteront à la limite légale de quatre mois du versement de la Prestation canadienne d’urgence (PCU). Plusieurs se feront dénoncer par leurs employeurs à l’Assurance-emploi : on qualifiera leur refus de rentrer au travail dans des conditions dangereuses de « départ volontaire », ce qui annulera leurs prestations d’aide financière.
2) Le « lien de confiance » entre la population et le gouvernement s’est grandement érodé
Le gouvernement et le minable trio Legault-Arruda-McCann ont perdu de leur capital de sympathie depuis le début de la crise sanitaire. Leur crédibilité aux yeux des masses populaires a connu une usure générale provoquée par les contradictions révélées au fil du temps. L’incapacité à assurer complètement et durablement la santé générale des travailleurs, ainsi que le désintérêt de l’État bourgeois devant cette tâche sont devenus indéniables. Le fiasco monumental dans les CHSLD en a été un bon exemple. Le recours maladroit à la notion « d’immunité collective naturelle » a aussi fait perdre des plumes à l’exécutif national. Le gouvernement du Québec peut de moins en moins se targuer, de manière mensongère, d’être à l’avant-garde de la lutte contre la COVID-19. De plus en plus, le gens voient clair dans ce petit jeu propagandiste : pour l’essentiel, les mêmes mesures, dans la même période, ont vu le jour dans tous les pays du monde. Le simple fait que l’Ontario ait maintenant dépassé le Québec en termes de nombre de tests de dépistage par jour fait pâlir la réputation du gouvernement Legault. Le retour hâtif des enfants à l’école alors qu’on assiste à des éclosions du virus partout où il y a des concentration de personnes crée une onde de choc dans les familles prolétariennes. Nous assistons à l’incohérence des mots d’ordre comme celui de renvoyer les petits en garderie, mais d’essayer de les faire garder par un proche à domicile, par un « jeune » grand-parent (tout en maintenant l’interdiction de rassemblements familiaux pour les personnes n’ayant pas la même adresse de résidence!), et ce, parce que finalement, la capacité d’accueil en garderie ne suffit pas à la demande. La situation actuelle est tout simplement absurde. Dans un pays comme le Canada, c’est un cas d’espèce, car le système parlementaire est d’ordinaire très fort et très peu contesté, mis à part qu’on enregistre de faibles taux de participation aux élections. La crise nous fait donc des révélations politiques importantes sur la nature de l’État bourgeois et il faudra s’assurer qu’elles ne tombent pas dans l’oubli, et ce, même si le personnel général de la bourgeoisie au pouvoir change de tête.
3) Les mesures de confinement vont laisser place à des mesures répressives
Avec la relance économique, la double fonction de l’état d’urgence sanitaire va apparaître avec netteté. Les mesures de confinement vont faire place à des mesures judiciaires, passant ainsi de la prévention à la répression. Ce qui aura « déjoué » la population, c’est qu’avec raison, le prolétariat a « toléré » la majorité de ces mesures judiciaires pendant la durée du confinement, et ce, pour parvenir à contenir l’épidémie. Mais désormais, les mesures de sécurité et de santé publique réelle vont disparaître au profit de mesures répressives plus injustes que jamais. Ces dernières seront des outils politiques dont se serviront les classes dominantes pour forcer la relance économique malgré sa dangerosité évidente. L’État capitaliste continuera d’invoquer la santé publique pour attaquer et humilier publiquement les travailleurs placés devant des choix difficiles. La dénonciation de l’absentéisme chez les préposées aux bénéficiaires en est déjà un bon exemple : le gouvernement fait porter l’odieux de ses ratés aux travailleuses qui tentent tant bien que mal de se protéger contre un virus dont la létalité est minimisée par les décideurs.
4) L’épidémie ne sera pas endiguée, bien au contraire, mais l’on en parlera de moins en moins
Le gouvernement est de plus en plus « silencieux » et « invisible ». C’est une tactique de sortie de crise : si l’on arrête de parler de la pandémie, les gens penseront qu’on en a fini avec elle. Déjà, on ne parle presque plus des CHSLD alors que la situation y est toujours catastrophique. Aussi, le manque d’équipement médical de protection est un « souvenir ancien » pourtant toujours d’actualité. D’ailleurs, pendant des semaines, le gouvernement a nié la pénurie de matériel médical pour plutôt parler de gaspillage et de mauvaise distribution. On a espéré que les beaux discours viennent masquer la réalité : les consignes dans les CISSS/CIUSSS laissaient clairement entrevoir qu’il fallait se « serrer la ceinture » et réduire au maximum l’usage de l’équipement, exposant ainsi tout le personnel hospitalier à de hauts risques de contamination. Il en va de même pour le dépistage. Plutôt que de parler de la pénurie d’écouvillons, le gouvernement se vantait de faire plus de tests que ses homologues. De la même façon, déjà, les conférences de presse des dirigeants ont été réduites en nombre, alors que nous sommes dans une situation bien plus critique qu’au début de la crise. Même chose pour les conférences interne dans le réseau de la santé. Et nous pouvons être certains qu’elles continueront de se faire de plus en plus rares, jusqu’à leur disparition. Aussi, les indicateurs seront de plus en plus obscurcis et inaccessibles (nombre d’infectés, nombre de lits disponibles dans les hôpitaux, nombre de tests, nombre de morts, etc.). L’État bourgeois sait bien que les masses ne peuvent pas à la fois connaître l’ampleur du désastre sanitaire et accepter de retourner sur leurs lieux de travail. Au final, on parlera de l’épidémie de COVID-19 comme d’un fait divers. Les médias s’en détourneront alors qu’ils ont mis la population sur le pied d’alerte pendant des semaines. Ils feindront d’être rassurants devant cette « simple grippe qui ne s’en prend qu’aux vieux ». On aura une impression de déjà vu, version « janvier-février 2020 ».
5) Un fort mouvement d’anti-syndicalisme a déjà émergé
Déjà, nous voyons poindre un fort mouvement d’anti-syndicalisme et malheureusement, il prendra de plus en plus d’ampleur. Le coup d’envoi d’un tel mouvement a été l’épisode des attaques du gouvernement contre le secteur public. Le gouvernement s’est servi de la crise sanitaire pour tenter de couper court à la négociation et pour tenter de faire entériner des conventions collectives désavantageuses pour les syndiqués. Ce mouvement réactionnaire s’est poursuivi lorsque le gouvernement a accusé de « corporatisme » les syndicats des travailleurs de la santé. Il s’est assuré que les médias colportent que ces syndicats ne veillaient pas au bien-être de l’ensemble de la société. L’offensive a connu un développement lorsque Legault, dans l’eau chaude sur la question des CHSLD, a fait diversion en tenant « le bureaucratisme » et « l’attentisme » des syndicats pour responsables des conditions de travail odieuses dans lesquelles pataugent les préposées aux bénéficiaires qualifiées, conditions de travail qui auraient conduit à une « désertion » massive et au peu d’attrait de la profession. Une autre attaque en règle a été menée contre le syndicat des employés de l’entretien de la Société de transport de Montréal (STM). Ces travailleurs étaient soumis eux aussi à des conditions de travail dangereuses qui ont causé l’infection de près d’une centaine d’entre eux en quelques semaines. La direction de la STM a donc suspendu le chef de leur syndicat pour avoir dénoncé la négligence de l’employeur et pour avoir défendu ceux qui refusaient de travailler. De manière générale, il faut combattre toute tentative de limiter l’organisation et l’activité syndicale. Avec la relance économique, ces entraves seront encore plus nombreuses qu’elles ne l’étaient déjà avant la crise sanitaire.
6) Les capitalistes et leurs organisations vont se faire entendre et passer à l’offensive
Les capitalistes et leurs organisations sont déjà en train de passer à l’offensive contre les travailleurs. Ils se sont déjà largement fait entendre sur l’ensemble des problèmes que la pause leur causait. Ils ont reçu des milliards de dollars en soutien du gouvernement grâce à des mesures économiques et fiscales jamais vues dans l’histoire du pays : prêts garantis, subventions salariales, prestations pour les dirigeants salariés, loyers commerciaux partiellement remboursés, etc. Un plan de « sauvetage économique » est en branle pour sauver les entreprises canadiennes face à l’épidémie, et nous n’en avons vu que le début. Au Québec, des organisations telles que la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, le Conseil du patronat du Québec, les Manufacturiers et Exportateurs du Québec (MEQ) et la Fédération des chambres de commerce du Québec passent à l’attaque contre les travailleurs « qui ne veulent pas retourner travailler », supposément parce qu’ils sont « gras dur » avec la PCU. Les capitalistes se plaignent que « les pauvres entrepreneurs déjà à sec » ne peuvent pas faire face à la concurrence déloyale des 2 000$ par mois imposables que verse le fédéral à ceux qui ont perdu temporairement leur emploi en mars dernier. Autrement dit, ils ne veulent pas offrir un salaire équivalent ou supérieur à ce qui a été jugé comme la base minimale de survie par l’État canadien. Pour la énième fois, ils crient à la « la pénurie de main-œuvre » en plus de dénoncer la soi-disant « lâcheté » des travailleurs rappelés au travail, mais qui refusent de se déconfiner.
7) Les « coffres de l’État » sont vides et il va falloir les remplir
Après des dépenses colossales de milliards de dollars, les coffres de l’État sont vides et il « faudra » les remplir. La dette publique fait de plus en plus la manchette dans les médias et dans la presse bourgeoise. La bourgeoisie livrera bataille pour regarnir les « coffres de l’État » et pour refaire le plein de fonds publics : entre autres, elle ira prélever des impôts sur la mince PCU. Elle procédera aussi au démantèlement de plusieurs utilités publiques et services à la population. C’est une longue période de vaches maigres que les gouvernements nous réservent pour les prochaines années. Sans aucun doute, la bourgeoisie fera campagne pour nier complètement les effets dévastateurs du capitalisme sur la société et sur la production. Elle remplacera la vérité par une présentation distordue et incorrecte de l’impact de la pandémie sur l’économie.
8) Des foyers de contagion et de contestation populaire vont émerger
Des éclosions de COVID-19 surviendront sur le territoire, dans des poches de population plus vulnérables. C’est déjà le cas dans l’arrondissement de Montréal-Nord et plus largement, dans la grande région métropolitaine, ce qui a de quoi inquiéter grandement le prolétariat. Ces foyers de contagion aiguë concentrent des contradictions dans la société, à commencer par celle entre la bourgeoisie et ceux qu’elle exploite impunément. L’apparition de ces poches populationnelles en détresse sanitaire marquera un tournant dans la gestion de la crise. Jusqu’à présent, le gouvernement dépeint la situation comme étant généralement sous contrôle dans la province, à l’exception de quelques « points chauds », et ce, pour accélérer le déconfinement partout en dehors de ceux-ci. La détresse des uns fait le bonheur des autres : la bourgeoisie instrumentalise le bourbier montréalais pour rassurer les régions sur leur propre sort. Mais la COVID-19 court et elle ne connaît pas de frontières… Cette tactique boiteuse se retournera forcément contre le gouvernement.
9) L’éloge des travailleurs des services essentiels et les primes qui leur sont accordées vont prendre fin
La prime accordée aux travailleurs des services essentiels qui ont été maintenus à l’ouvrage pendant la durée du confinement va finir par leur être retirée. Le retour aux bas salaires ira de pair avec la fin des propos élogieux à l’endroit des travailleurs essentiels « héroïques » et de « nos anges gardiens ». Au final, cette éloge qui sonne faux dans la bouche de Legault et de ses acolytes n’aura jamais constitué une reconnaissance consciente et explicite de la division du travail et de la coopération entre les êtres humains pour atteindre leurs objectifs comme mécanismes de base de la société. Au final, ces mécanismes peuvent être compris comme suit : à tout travail, une utilité. Cela fait d’ailleurs écho à des principes politiques généraux du socialisme tels que le pouvoir aux travailleurs ou encore le contrôle ouvrier de la production.
10) La contradiction entre le profit et les normes de santé et de sécurité va teinter la réalité quotidienne
Un affrontement entre deux tendances se prépare dans la société. D’un côté, il y aura ceux qui se battront pour le maintien des normes de prévention contre la COVID-19, et de l’autre, il y aura ceux qui tenteront de les faire tomber sous le poids de la relance économique et de la concurrence. Déjà, les normes prennent le bord : les employeurs refusent de « trop » dépenser pour de l’équipement et des aménagements. La situation ne fera qu’empirer avec le temps. Il est invraisemblable de penser qu’il sera possible de respecter les normes développées lors du confinement, dans les conditions exceptionnelles qu’il permettait. On assistera à un combat réel entre deux forces contraires, deux tendances sociales opposées : la réalisation subjective de ce qui est nécessaire d’accomplir pour faire face à la situation objective de l’épidémie (la santé publique réelle), versus la réactivation générale de l’économie capitaliste devant la concurrence, peu importe les dangers auxquels s’exposeront les travailleurs. La deuxième tendance va s’imposer par la cadence de travail exigée, les limites de l’espace mis à la disposition des travailleurs, les conditions générales de travail, etc. Le combat des prolétaires pour amener des transformations dans les rapports « quotidiens et normaux » dans le cadre des rapports de production capitalistes, ne sera pas de tout repos.
Le développement de chacun de ces éléments est à suivre de près. Mis ensemble, ils forment une situation générale explosive. Il faut garder en tête qu’il est totalement légitime et justifié de s’opposer à la relance économique et de dénoncer la gestion criminelle de la crise, tout comme il est nécessaire de décrier la concurrence internationale barbare entre les puissances impérialistes ayant mené à la détérioration de la situation sanitaire mondiale. Avec l’aggravation de la pandémie, la lutte des classes est appelée à se développer dans les prochains mois.
1) La relance économique et le déconfinement, alors que la situation n’est pas contrôlée, vont mettre en danger les travailleurs
La relance économique survient non pas grâce à la maîtrise durable de la situation sanitaire, mais plutôt en raison de la pression exercée par la concurrence internationale et de la nécessité de relancer l’accumulation de profits au Québec comme ailleurs. Le tout a mis fin abruptement à la trêve commune adoptée par les capitalistes à travers le monde. La relance économique, alors que l’épidémie n’est pas sous contrôle, va mettre en danger des millions de travailleurs qui feront face à des conditions de travail de plus en plus dangereuses. Avec la réouverture des écoles et des lieux de travail, nous assisterons inévitablement à l’aggravation de la propagation du virus. Le retour au travail sera forcé pour de nombreux prolétaires : ils se buteront à la limite légale de quatre mois du versement de la Prestation canadienne d’urgence (PCU). Plusieurs se feront dénoncer par leurs employeurs à l’Assurance-emploi : on qualifiera leur refus de rentrer au travail dans des conditions dangereuses de « départ volontaire », ce qui annulera leurs prestations d’aide financière.
2) Le « lien de confiance » entre la population et le gouvernement s’est grandement érodé
Le gouvernement et le minable trio Legault-Arruda-McCann ont perdu de leur capital de sympathie depuis le début de la crise sanitaire. Leur crédibilité aux yeux des masses populaires a connu une usure générale provoquée par les contradictions révélées au fil du temps. L’incapacité à assurer complètement et durablement la santé générale des travailleurs, ainsi que le désintérêt de l’État bourgeois devant cette tâche sont devenus indéniables. Le fiasco monumental dans les CHSLD en a été un bon exemple. Le recours maladroit à la notion « d’immunité collective naturelle » a aussi fait perdre des plumes à l’exécutif national. Le gouvernement du Québec peut de moins en moins se targuer, de manière mensongère, d’être à l’avant-garde de la lutte contre la COVID-19. De plus en plus, le gens voient clair dans ce petit jeu propagandiste : pour l’essentiel, les mêmes mesures, dans la même période, ont vu le jour dans tous les pays du monde. Le simple fait que l’Ontario ait maintenant dépassé le Québec en termes de nombre de tests de dépistage par jour fait pâlir la réputation du gouvernement Legault. Le retour hâtif des enfants à l’école alors qu’on assiste à des éclosions du virus partout où il y a des concentration de personnes crée une onde de choc dans les familles prolétariennes. Nous assistons à l’incohérence des mots d’ordre comme celui de renvoyer les petits en garderie, mais d’essayer de les faire garder par un proche à domicile, par un « jeune » grand-parent (tout en maintenant l’interdiction de rassemblements familiaux pour les personnes n’ayant pas la même adresse de résidence!), et ce, parce que finalement, la capacité d’accueil en garderie ne suffit pas à la demande. La situation actuelle est tout simplement absurde. Dans un pays comme le Canada, c’est un cas d’espèce, car le système parlementaire est d’ordinaire très fort et très peu contesté, mis à part qu’on enregistre de faibles taux de participation aux élections. La crise nous fait donc des révélations politiques importantes sur la nature de l’État bourgeois et il faudra s’assurer qu’elles ne tombent pas dans l’oubli, et ce, même si le personnel général de la bourgeoisie au pouvoir change de tête.
3) Les mesures de confinement vont laisser place à des mesures répressives
Avec la relance économique, la double fonction de l’état d’urgence sanitaire va apparaître avec netteté. Les mesures de confinement vont faire place à des mesures judiciaires, passant ainsi de la prévention à la répression. Ce qui aura « déjoué » la population, c’est qu’avec raison, le prolétariat a « toléré » la majorité de ces mesures judiciaires pendant la durée du confinement, et ce, pour parvenir à contenir l’épidémie. Mais désormais, les mesures de sécurité et de santé publique réelle vont disparaître au profit de mesures répressives plus injustes que jamais. Ces dernières seront des outils politiques dont se serviront les classes dominantes pour forcer la relance économique malgré sa dangerosité évidente. L’État capitaliste continuera d’invoquer la santé publique pour attaquer et humilier publiquement les travailleurs placés devant des choix difficiles. La dénonciation de l’absentéisme chez les préposées aux bénéficiaires en est déjà un bon exemple : le gouvernement fait porter l’odieux de ses ratés aux travailleuses qui tentent tant bien que mal de se protéger contre un virus dont la létalité est minimisée par les décideurs.
4) L’épidémie ne sera pas endiguée, bien au contraire, mais l’on en parlera de moins en moins
Le gouvernement est de plus en plus « silencieux » et « invisible ». C’est une tactique de sortie de crise : si l’on arrête de parler de la pandémie, les gens penseront qu’on en a fini avec elle. Déjà, on ne parle presque plus des CHSLD alors que la situation y est toujours catastrophique. Aussi, le manque d’équipement médical de protection est un « souvenir ancien » pourtant toujours d’actualité. D’ailleurs, pendant des semaines, le gouvernement a nié la pénurie de matériel médical pour plutôt parler de gaspillage et de mauvaise distribution. On a espéré que les beaux discours viennent masquer la réalité : les consignes dans les CISSS/CIUSSS laissaient clairement entrevoir qu’il fallait se « serrer la ceinture » et réduire au maximum l’usage de l’équipement, exposant ainsi tout le personnel hospitalier à de hauts risques de contamination. Il en va de même pour le dépistage. Plutôt que de parler de la pénurie d’écouvillons, le gouvernement se vantait de faire plus de tests que ses homologues. De la même façon, déjà, les conférences de presse des dirigeants ont été réduites en nombre, alors que nous sommes dans une situation bien plus critique qu’au début de la crise. Même chose pour les conférences interne dans le réseau de la santé. Et nous pouvons être certains qu’elles continueront de se faire de plus en plus rares, jusqu’à leur disparition. Aussi, les indicateurs seront de plus en plus obscurcis et inaccessibles (nombre d’infectés, nombre de lits disponibles dans les hôpitaux, nombre de tests, nombre de morts, etc.). L’État bourgeois sait bien que les masses ne peuvent pas à la fois connaître l’ampleur du désastre sanitaire et accepter de retourner sur leurs lieux de travail. Au final, on parlera de l’épidémie de COVID-19 comme d’un fait divers. Les médias s’en détourneront alors qu’ils ont mis la population sur le pied d’alerte pendant des semaines. Ils feindront d’être rassurants devant cette « simple grippe qui ne s’en prend qu’aux vieux ». On aura une impression de déjà vu, version « janvier-février 2020 ».
5) Un fort mouvement d’anti-syndicalisme a déjà émergé
Déjà, nous voyons poindre un fort mouvement d’anti-syndicalisme et malheureusement, il prendra de plus en plus d’ampleur. Le coup d’envoi d’un tel mouvement a été l’épisode des attaques du gouvernement contre le secteur public. Le gouvernement s’est servi de la crise sanitaire pour tenter de couper court à la négociation et pour tenter de faire entériner des conventions collectives désavantageuses pour les syndiqués. Ce mouvement réactionnaire s’est poursuivi lorsque le gouvernement a accusé de « corporatisme » les syndicats des travailleurs de la santé. Il s’est assuré que les médias colportent que ces syndicats ne veillaient pas au bien-être de l’ensemble de la société. L’offensive a connu un développement lorsque Legault, dans l’eau chaude sur la question des CHSLD, a fait diversion en tenant « le bureaucratisme » et « l’attentisme » des syndicats pour responsables des conditions de travail odieuses dans lesquelles pataugent les préposées aux bénéficiaires qualifiées, conditions de travail qui auraient conduit à une « désertion » massive et au peu d’attrait de la profession. Une autre attaque en règle a été menée contre le syndicat des employés de l’entretien de la Société de transport de Montréal (STM). Ces travailleurs étaient soumis eux aussi à des conditions de travail dangereuses qui ont causé l’infection de près d’une centaine d’entre eux en quelques semaines. La direction de la STM a donc suspendu le chef de leur syndicat pour avoir dénoncé la négligence de l’employeur et pour avoir défendu ceux qui refusaient de travailler. De manière générale, il faut combattre toute tentative de limiter l’organisation et l’activité syndicale. Avec la relance économique, ces entraves seront encore plus nombreuses qu’elles ne l’étaient déjà avant la crise sanitaire.
6) Les capitalistes et leurs organisations vont se faire entendre et passer à l’offensive
Les capitalistes et leurs organisations sont déjà en train de passer à l’offensive contre les travailleurs. Ils se sont déjà largement fait entendre sur l’ensemble des problèmes que la pause leur causait. Ils ont reçu des milliards de dollars en soutien du gouvernement grâce à des mesures économiques et fiscales jamais vues dans l’histoire du pays : prêts garantis, subventions salariales, prestations pour les dirigeants salariés, loyers commerciaux partiellement remboursés, etc. Un plan de « sauvetage économique » est en branle pour sauver les entreprises canadiennes face à l’épidémie, et nous n’en avons vu que le début. Au Québec, des organisations telles que la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, le Conseil du patronat du Québec, les Manufacturiers et Exportateurs du Québec (MEQ) et la Fédération des chambres de commerce du Québec passent à l’attaque contre les travailleurs « qui ne veulent pas retourner travailler », supposément parce qu’ils sont « gras dur » avec la PCU. Les capitalistes se plaignent que « les pauvres entrepreneurs déjà à sec » ne peuvent pas faire face à la concurrence déloyale des 2 000$ par mois imposables que verse le fédéral à ceux qui ont perdu temporairement leur emploi en mars dernier. Autrement dit, ils ne veulent pas offrir un salaire équivalent ou supérieur à ce qui a été jugé comme la base minimale de survie par l’État canadien. Pour la énième fois, ils crient à la « la pénurie de main-œuvre » en plus de dénoncer la soi-disant « lâcheté » des travailleurs rappelés au travail, mais qui refusent de se déconfiner.
7) Les « coffres de l’État » sont vides et il va falloir les remplir
Après des dépenses colossales de milliards de dollars, les coffres de l’État sont vides et il « faudra » les remplir. La dette publique fait de plus en plus la manchette dans les médias et dans la presse bourgeoise. La bourgeoisie livrera bataille pour regarnir les « coffres de l’État » et pour refaire le plein de fonds publics : entre autres, elle ira prélever des impôts sur la mince PCU. Elle procédera aussi au démantèlement de plusieurs utilités publiques et services à la population. C’est une longue période de vaches maigres que les gouvernements nous réservent pour les prochaines années. Sans aucun doute, la bourgeoisie fera campagne pour nier complètement les effets dévastateurs du capitalisme sur la société et sur la production. Elle remplacera la vérité par une présentation distordue et incorrecte de l’impact de la pandémie sur l’économie.
8) Des foyers de contagion et de contestation populaire vont émerger
Des éclosions de COVID-19 surviendront sur le territoire, dans des poches de population plus vulnérables. C’est déjà le cas dans l’arrondissement de Montréal-Nord et plus largement, dans la grande région métropolitaine, ce qui a de quoi inquiéter grandement le prolétariat. Ces foyers de contagion aiguë concentrent des contradictions dans la société, à commencer par celle entre la bourgeoisie et ceux qu’elle exploite impunément. L’apparition de ces poches populationnelles en détresse sanitaire marquera un tournant dans la gestion de la crise. Jusqu’à présent, le gouvernement dépeint la situation comme étant généralement sous contrôle dans la province, à l’exception de quelques « points chauds », et ce, pour accélérer le déconfinement partout en dehors de ceux-ci. La détresse des uns fait le bonheur des autres : la bourgeoisie instrumentalise le bourbier montréalais pour rassurer les régions sur leur propre sort. Mais la COVID-19 court et elle ne connaît pas de frontières… Cette tactique boiteuse se retournera forcément contre le gouvernement.
9) L’éloge des travailleurs des services essentiels et les primes qui leur sont accordées vont prendre fin
La prime accordée aux travailleurs des services essentiels qui ont été maintenus à l’ouvrage pendant la durée du confinement va finir par leur être retirée. Le retour aux bas salaires ira de pair avec la fin des propos élogieux à l’endroit des travailleurs essentiels « héroïques » et de « nos anges gardiens ». Au final, cette éloge qui sonne faux dans la bouche de Legault et de ses acolytes n’aura jamais constitué une reconnaissance consciente et explicite de la division du travail et de la coopération entre les êtres humains pour atteindre leurs objectifs comme mécanismes de base de la société. Au final, ces mécanismes peuvent être compris comme suit : à tout travail, une utilité. Cela fait d’ailleurs écho à des principes politiques généraux du socialisme tels que le pouvoir aux travailleurs ou encore le contrôle ouvrier de la production.
10) La contradiction entre le profit et les normes de santé et de sécurité va teinter la réalité quotidienne
Un affrontement entre deux tendances se prépare dans la société. D’un côté, il y aura ceux qui se battront pour le maintien des normes de prévention contre la COVID-19, et de l’autre, il y aura ceux qui tenteront de les faire tomber sous le poids de la relance économique et de la concurrence. Déjà, les normes prennent le bord : les employeurs refusent de « trop » dépenser pour de l’équipement et des aménagements. La situation ne fera qu’empirer avec le temps. Il est invraisemblable de penser qu’il sera possible de respecter les normes développées lors du confinement, dans les conditions exceptionnelles qu’il permettait. On assistera à un combat réel entre deux forces contraires, deux tendances sociales opposées : la réalisation subjective de ce qui est nécessaire d’accomplir pour faire face à la situation objective de l’épidémie (la santé publique réelle), versus la réactivation générale de l’économie capitaliste devant la concurrence, peu importe les dangers auxquels s’exposeront les travailleurs. La deuxième tendance va s’imposer par la cadence de travail exigée, les limites de l’espace mis à la disposition des travailleurs, les conditions générales de travail, etc. Le combat des prolétaires pour amener des transformations dans les rapports « quotidiens et normaux » dans le cadre des rapports de production capitalistes, ne sera pas de tout repos.
Le développement de chacun de ces éléments est à suivre de près. Mis ensemble, ils forment une situation générale explosive. Il faut garder en tête qu’il est totalement légitime et justifié de s’opposer à la relance économique et de dénoncer la gestion criminelle de la crise, tout comme il est nécessaire de décrier la concurrence internationale barbare entre les puissances impérialistes ayant mené à la détérioration de la situation sanitaire mondiale. Avec l’aggravation de la pandémie, la lutte des classes est appelée à se développer dans les prochains mois.
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