Les crises nous donnent l’occasion
d’aller au fond, de voir les grandes lignes de notre monde et en fin de
compte de comprendre l’époque. On pourrait penser que les USA sont à
genou avec 30 millions de chômeurs, mais cela serait mal comprendre la
domination de l’impérialisme US sur l’économie mondiale. Notre article
sur la situation mondiale à suscité de nombreux débats, et nous
souhaitons revenir sur ce point. Les capitaux ne fuient pas le pays mais
au contraire viennent amortir la crise1.
Le monde s’arrache littéralement les bons du trésor US, et pour cause
ils sont extrêmement rentables. C’est pour cela que le Trésor US peut
inonder le pays de liquidités et continuer à s’endetter. Les USA
contrôlent de nombreux pays via l’endettement et avec bien sûr
l’hégémonie du dollar. C’est un fait, l’impérialisme US va ressortir
encore plus fort et plus agressif de la crise.
Nous pourrions penser que les attaques de Trump contre la Chine
visent à détourner les citoyens états-uniens de ses propres erreurs, il y
a sûrement une part de vérité là dedans, mais elle est largement
secondaire face aux vrais raisons. Les impérialistes US savent que la
Chine est dans une position de faiblesse, la crise va affecter son
économie exportatrice, qui par ailleurs produit des biens d’une valeur
ajoutée bien inférieure à celle des économies de la Triade2.
Trump a la main et pousse donc les chinois dans leurs retranchements,
le but étant de regagner des parts de marché, et de soumettre la Chine.
Les Chinois ont une place dans l’économie mondiale, mais dominée par les
USA, c’est à dire seulement une place, il n’est pas question que les
USA laissent trop la Chine se développer. Les USA vont tout faire pour
que les chinois acceptent le contrôle du taux de change et faire donc
cesser le maintient artificiellement bas du Yuan. Il n’en sont pas à
leur premier essai. Rappelons-nous que les USA avaient mis fin à
l’exponentiel développement Japonais qui gênait l’impérialisme US lors
des accords de Plaza en 1985. En effet les Japonais étaient entrain de
racheter littéralement les USA, avec des investissements massifs dans
l’immobilier. Les Allemands, là aussi, étaient d’ailleurs visés et les
français dans une moindre mesure. cet évènement avait forcé les autres
puissances impérialistes à accepter de dévaluer le dollar et à pratiquer
une politique commune autour du taux de change. En effet le dollar
étant la monnaie mondiale de référence, sa tendance est à l’augmentation du fait de la spéculation. Si le dollar est trop haut, les biens produits aux USA deviennent peu compétitifs et la balance commerciale devient largement déficitaire. Le Trésor US a fixé à 20 milliards de dollars le déficit commercial acceptable avec les autres pays. Il y a peu de pays dans ce cas, la Chine, le Japon et l’Allemagne. Le Japon a déjà accepté, en partie, les termes US lors de négociations commerciales en Octobre 20193. La Chine a récemment commencé à céder face aux USA. L’Allemagne se sait donc dans le viseur, sauf qu’effectivement la République Fédérale Allemande participe à un ensemble économique plus large avec l’UE. La tâche va être sensiblement plus complexe pour les USA.
Ce qui est sûr, c’est que l’agressivité de l’impérialisme US contre la Chine va à l’encontre d’autres impérialismes, aujourd’hui principalement allemand pour des raisons commerciales que nous avons évoquées plus haut. L’Allemagne est très dépendante de ses exportations, elle a besoin d’une stabilité pour faire des affaires. La politique agressive de Trump crée une instabilité très peu propice pour développer une politique économique. De plus rien ne va empêcher Trump de mener une guerre commerciale contre l’UE, ce qu’il a déjà commencé.
Il est intéressant de placer, donc, la note divulguée par les services secrets allemands où ils confondent Trump à propos de l’accusation de responsabilité de la Chine4 pour le COVID 19 dans ce cadre là. L’Allemagne se sait dans le viseur du Trésor US. D’ailleurs, Macron a vu la possibilité de pouvoir regagner quelques places face à l’Allemagne et a donc soutenu les accusations de Trump face à la Chine5. L’impérialisme français profite des problèmes de son puissant voisin, bien entendu.
Nous devons comprendre qu’il n’y aura pas de rupture entre l’impérialisme d’hier et celui de demain. Le Wallstreet journal vient de sortir une analyse du « monde de demain », pour lui le monde sera plus cartellisé, plus globalisé et plus technologique. Les crises accentuent toujours plus la concentration du capital, il est simple de comprendre que vu que les monopoles dominants le monde sont US alors l’économie mondiale va être encore plus dominée par Trump et ses acolytes. En second, le monde ne va pas se refermer sur lui même, il n’y aura pas de réindustrialisation et encore moins de décroissance, au contraire il va continuer à se « globaliser ». Encore une fois, si nous analysons la domination économique de l’impérialisme US, nous voyons bien que cette dynamique ne va que les renforcer. De même qu’aujourd’hui les monopoles US dominent le monde technologique avec les GAFAM, par exemple. La Chine est technologiquement en retard et dépend, pour le moment, des importations US pour les produits les plus avancées. C’est ce que souhaite changer le 13ème plan quinquennal chinois qui « demande aux sociétés chinoises de développer l’innovation et de se moderniser dans de nombreux secteurs »6.
Henry Kissenger, que tout le monde pensait mort, vient de sortir une analyse très importante sur la situation mondiale actuelle7. C’est un acteur historique très important de l’impérialisme US, l’écouter peut nous permettre d’entrevoir les dynamiques à venir. Le plus important de son analyse c’est que le monde ne doit pas se refermer sur lui-même, il faut que le libéralisme triomphe, c’est en complet accord avec Wallstreet. En second il nous dit qu’il faut mettre en place une gouvernance mondiale, c’est à dire, venant de lui, un monde coordonné derrière la puissance impérialiste US. Bien entendu cela restera un rêve pieux de l’impérialisme, mais il indique les tendance à venir.
Aujourd’hui, aucun impérialisme ne peut prétendre mettre en danger l’hégémonie US. Cette situation, principale, fait que les stratégies des autres impérialismes ne peuvent se faire qu’en relation avec la domination US. Certains peuvent s’y lier totalement comme les Britanniques, accepter leur domination mais manœuvrer comme le Japon en se re-préparant aux futurs affrontements (remilitarisation), avoir une stratégie de devenir une superpuissance comme l’Allemagne en redéveloppant son potentiel militaire, tenter de rivaliser en se modernisant comme la Chine qui y est de toute manière forcée. L’impérialisme français, lui n’a pas d’autre choix pour garder une place mondiale que de tenter de se lier à l’Allemagne qui ne veut pas d’une telle alliance pour l’instant. L’impérialisme français n’a ni une monnaie à manipuler, ni un potentiel industriel pour tenter de rivaliser, il ne lui reste que sa puissance militaire qu’il va devoir sans cesse renforcer sur le dos des masses. Les masses vont porter littéralement à bout de bras l’impérialisme français en putréfaction. La lutte contre les monopoles et contre la militarisation de la société est, donc, une nécessité urgente.
1
https://www.lemonde.fr/economie/article/2011/08/09/malgre-une-note-degradee-la-dette-americaine-s-arrache-a-des-prix-record_1557917_3234.html
2 Traditionnelement, les USA, le Japon et l’UE
3 https://www.lefigaro.fr/flash-eco/les-etats-unis-et-le-japon-signent-un-accord-commercial-limite-20191007
4 https://lanouvelletribune.info/2020/05/attaques-contre-la-chine-trump-confondu-par-les-services-secrets-allemands/
5
https://www.ladepeche.fr/2020/04/16/gestion-du-virus-en-chine-macron-emet-a-son-tour-des-doutes-apres-washington-et-londres,8850092.php
6 https://cn.ambafrance.org/Conference-sur-l-innovation-et-la-planification-en-Chine-le
7
https://kontrainfo.com/henry-kissinger-propone-un-nuevo-orden-mundial-post-coronavirus-se-alterara-el-orden-mundial-para-siempre-texto-completo/
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